C’était le temps où le “garagiste concessionnaire” livrait le véhicule neuf !!
LA NOUVELLE 2 CV
Au temps où elles étaient livrées. Légende imaginaire d’une photo.
Il avait plu très tôt ce matin de printemps de 1966 dans le petit bourg d’Eure et Loir. Peu à peu l’éclaircie s’affirmait et bientôt un soleil encore pâle viendrait doucement révéler les couleurs de la rue principale encore endormie. C’était un de ces moments magiques où chaque son pouvait encore s’apprécier sans interférence avant que les premiers passants ne viennent fouler les trottoirs d’un pas pressé en direction de la gare. Puis jusqu’au tintement de la cloche de l’école voisine le frais babillement des enfants résonnerait sur les murs des façades. Alors il serait temps pour Marguerite d’ouvrir sa petite épicerie, encore baptisée du nom évocateur de l’ancien estaminet et d’y attendre la venue des premières clientes avec qui partager les potins du jour.
Mais ce n’était pas un jour ordinaire. Marguerite s’était levée de bonne heure. A vrai dire elle n’avait pas beaucoup dormi, impatiente de l’évènement attendu au petit matin qui ferait d’elle la plus enviée des pipelettes du bourg. Depuis que le jour s’était levé Marguerite pointait à sa fenêtre du premier étage, le regard fixé au plus lointain de la rue, quand elle perçut distinctement le bruit caractéristique qui lui fit palpiter le cœur. Alors ce fut l’émerveillement de voir débouler, puis ralentir, puis s’arrêter devant l’épicerie la magnifique 2CV AZAM au volant de laquelle elle reconnut le vendeur du garage Citroën de Châteaudun. Enfin on lui livrait SA 2CV, celle sur laquelle elle avait de suite craqué il y a dix jours déjà alors qu’elle venait de pénétrer dans le hall de la concession. Pas neuve certes ! Mais presque. Toute rutilante avec ses chromes bien visibles à la jointure des phares, sur la baguette de bas de caisse, les enjoliveurs, la calandre et surtout les renforts de pare-chocs. Ah qu’elle était belle, si belle dans sa robe grise. Et que dire des sièges moelleux drapés de rouge intense, du volant nacré qui n’attendaient que Marguerite. L’affaire fut rapide, et facile pour le vendeur.
Alors en ce jour radieux, dans la petite épicerie, Marguerite était bien décidée à tenir son rôle de reine…des potins.